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afoulay
12 février 2007

Le triomphe de l'art américain

                                Le triomphe de l'art américain

1.      L'expressionnisme abstrait

2.      Les années soixante

3.      L'école de New-York

Dans les années cinquante les américains vécurent une révolution culturelle : elle avait comme héros, Pollock, Wahrol, Motherwell, Rauschenberg, De Kooning ou Lichtenstein... un ouvrage du plus grand intérêt rend compte de ce moment captivant de l'art contemporain

Figure emblématique de l'art contemporain, Andy Warhol expose le fac-similé d'une boîte de savon... brisant les canons de la subjectivité artistique, l'artiste américain place l'objet - et plus particulièrement l'objet standardisé de la production industrielle de masse - au coeur de l'art. La démarche objectiviste de Warhol, s'apparente à celle de Frank Stella, dont l'abstraction géométrique d'alors - nous sommes en 1960 - tente d'abolir " la puanteur de l'ego de l'artiste ". Nouveau réalisme et cool art - traduisez " art froid " - réagissent à une autre révolution artistique propre à la décennie précédente. Celle de ces jeunes gens en colère, ces irascibles, qui, de Rothko à Pollock, en passant par De kooning ou Gottlieb, brisent délibérément les contraintes académiques et les conventions de l'esthétique formaliste pour se livrer à un expressionnisme abstrait sauvage.

Au terme de cette évolution, la construction disparaît sous l'aléatoire apparent du dripping pollockien : la référence au réel - et même la référence à un projet intérieur - s'abolit pour faire place à un espace pictural pur, d'une densité visuelle extrême, exprimant à l'état brut l'énergie du geste plastique. La déstructuration du réel s'opère aussi chez De Kooning, dont les portraits se chargent d'une violence gestuelle à peine contrôlée tandis qu'au bout de son parcours expressionniste abstrait, Hoffman revient à une sorte de géométrisme tempéré par la matérialité robuste de sa couleur et de son surfaçage. La révolution lyrique des années cinquante met en avant la gestualité du peintre dont l'art devient action pure, expression sans fard d'une énergie intérieure, sauvage, primitive, décharge agressive ou épanchement spontanéiste d'un ego qui, quelques années plus tard, rencontrera l'opprobre des néoréalistes pop. Expressionnisme abstrait, pop art et, à la fin des années soixante, l'hyperréalisme seront les figures majeures de l'art contemporain... Ces années-là furent décisives : New-York prenait la place de Paris sur la scène artistique internationale. C'est le triomphe de l'art américain, triomphe d'artistes sauvages qui se jouèrent allègrement autant des conventions académiques - celui d'un pictorialisme plus publicitaire qu'esthétique - que avant-gardes à la mode.

Parallèlement au pop art, qui entretenait avec la culture consumeriste des rapports ambigus, tour à tour ironiques, critiques ou ostensiblement opportunistes, d'autres remises en question s'opérèrent, toujours sous les modalités de la critique radicale et de la " mort de l'art ". Le land art, qui privilégiait les réalisations in-situ et la transformation du paysage, affirmait une dimension nouvelle, écologique, des arts plastiques... Certes il y a une dimension prométhéenne dans l'oeuvre de Heizer ou de Smithson, qui s'apparente plus aux travaux publics qu'aux " beaux-arts ", mais d'autres artistes - De Maria, Oppenheim se refusent à marquer leur empreinte dans la nature autrement que par des oeuvres périssables, soumises, comme tout être vivant, au joug de la finitude et de la désagrégation entropique, tandis que Richard Long se livre à une ascèse personnelle transposant dans l'espace muséal les traces et les signes de parcours ritualisés exercés dans un espace géographique vierge de toute urbanité : marches circulaires, sillons patiemment tracés par les allées et venues, arpentages topographiques accompagnent les constructions lithiques et les cercles muraux de boue - empreintes palmaires qui renvoient à la ritualité de l'art pariétal.

En dépit des mouvements de rupture et des attitudes avant-gardistes, on retrouve dans l'art contemporain des USA les thématiques récurrentes de la littérature américaine, qui était présente, soit dit en passant, dans l'art " classique " des USA : le rapport servile à l'objet, l'omniprésence de la culture matérielle, le mythe des frontières vierges, l'esprit d'aventure et de rébellion passionnée se retrouve dans une conscience esthétique mêlant étroitement utopie et affirmation dominatrice.

Mais à la fin des seventies, l'hégémonie avant-gardiste se dissout en de multiples tentatives, hétéroclites et fragmentées : les courants et écoles idéologiquement structurées font place à des initiatives individuelles, autoréférencielles, déconstruites, obliques et multiformes : les artistes produisent des installations temporaires, qui font appel à des matériaux diversifiés, à la signification psychologique et autobiographique délibérément ouverte. Louise Bourgeois sculpte des concepts organiques, biologiques, qui à force de féminité pulsionnelle trifouille dans notre inconscient en quête de sécurité utérine, Samaras métamorphose des objets banaux en fantasmes exubérants, exprimant un certain narcissisme, William T. Wiley utilise délibérément des matériaux bruts, grossiers, vulgaires pour exprimer plastiquement l'absurde et la dérision : l'art devient un jeu gratuit, s'apparentant à la para-culture de rue.

Des entretiens avec des artistes fournissent le matériau de base d'une trilogie consacrée à l'art américain de 1950 à 1970... cet ouvrage, richement illustré et très vivant, rend compte avec brio des changements stylistiques fondamentaux qui ont marqué l'art moderne depuis la fin de la guerre et des discours théoriques qui les justifiaient. Certes, le point de vue est américano-centriste, mais force est de reconnaître que les USA se trouvèrent, durant ces deux décennies, à l'avant-garde des arts plastiques, dominées, en Europe, par un pesant héritage surréaliste... le lecteur gardera en esprit la résonance entre Cobra et l'expressionnisme lyrique d'un Gorky ou du premier Pollock, entre l'arte povera italien, plus tardif, et certaines pratiques minimalistes de Richard Serra, entre les performances du mouvement Fluxus et l'actionnisme viennois... L'Europe a depuis lors, repris la parole en matière d'arts plastiques. Mais à vrai dire, on se rend compte que sans cette turbulence américaine, l'art contemporain des deux dernières décennies, ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui.

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